Table ronde interdisciplinaire "les game-changers dans les soins de santé"

Les technologies médicales peuvent ralentir l’inflation des soins de santé

Les coûts des soins de santé augmentent chaque année. Si cette hausse est en partie due à des facteurs qui échappent à notre contrôle, notamment le vieillissement de la population, nous pouvons néanmoins ralentir considérablement l’inflation des soins de santé. Bon nombre d’outils technologiques susceptibles d’améliorer et d’optimiser notre système de soins de santé ne voient pas le jour, principalement en raison de l’obsolescence du modèle de financement en place. Plusieurs parties prenantes ont formulé des recommandations pour sortir de cette impasse.

« Grâce aux technologies médicales, nous pouvons améliorer et optimiser différents processus de soins, ce qui se traduira par de meilleurs résultats pour les patients et un soutien accru pour les prestataires. Il ne s’agit pas d’inventer ces technologies : de nombreuses solutions existent déjà. Mais voilà, ces solutions sont rarement, voire jamais, déployées dans la pratique. La bonne nouvelle est que nous pouvons rapidement nous améliorer : si nous ajustons le système de financement aujourd’hui, les patients et les prestataires de soins en profiteront dès demain. ».

Marnix Denys, Managing Director de beMedTech

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Syndrome d’apnée obstructive du sommeil

À l’ère où l’État doit compter chaque euro, nous continuons à payer trop cher pour des soins de santé qui pourraient être plus conviviaux et plus efficaces pour les patients. Un bon exemple est celui des personnes atteintes du syndrome d’apnée obstructive du sommeil, une pathologie pour laquelle environ 140 000 Belges sont traités à ce jour.

À l’heure actuelle, les patients doivent obligatoirement passer la nuit à l’hôpital pour l’établissement du diagnostic et y retourner par la suite pour le lancement du traitement. Grâce aux équipements perfectionnés dont nous disposons aujourd’hui, cette procédure pourrait pourtant être mise en œuvre au domicile du patient, sans déroger à la qualité ni à la sécurité. Avec des avantages pour toutes les parties : les mesures à domicile étant plus proches des conditions normales de sommeil que celles effectuées à l’hôpital, l’équipe soignante obtiendrait des données plus réalistes, le patient bénéficierait d’un confort accru et les pouvoirs publics auraient moins d’argent à débourser.

Si les solutions existent déjà, pourquoi continuons-nous à financer des alternatives moins efficaces ? Et comment donner une chance à l’innovation ? Ces questions étaient au cœur de notre table ronde interdisciplinaire « Gamechangers in de zorg », à laquelle ont notamment pris part des patients, des hôpitaux, des mutuelles, des organisations de soins (à domicile) et des entreprises.

Un modèle de financement dépassé

Les participants estiment que la principale cause de la non-exploitation ou de l’exploitation insuffisante du potentiel des technologies médicales réside dans le modèle de financement. Celui-ci demeure largement inchangé depuis des décennies, tandis que le secteur des technologies médicales évolue à toute vitesse. En d’autres termes, nous envisageons les nouvelles solutions à travers un prisme obsolète. Nous peinons donc à les évaluer correctement et à leur accorder une place dans le secteur des soins de santé.

Dans certains cas, le modèle de financement actuel s’avère même vicieux : il récompense les prestataires et les institutions de soins de ne pas avoir organisé plus efficacement certains traitements. Les prestataires de soins sont, en effet, principalement rémunérés pour la quantité et non pour la qualité. Il est donc financièrement désavantageux pour eux d’utiliser de nouvelles technologies qui permettent d’organiser les soins de manière plus efficace, même si ces technologies favorisent la santé et la qualité de vie des patients et soulagent les prestataires de soins…

Outre le modèle de financement, les participants voient deux autres raisons pour lesquelles les innovations technologiques utiles ont tant de mal à se faire une place : l’aversion au risque des prestataires et des institutions de soins, d’une part, et le manque de culture numérique dans le chef des prestataires, des patients et des pouvoirs publics, d’autre part.

Rompre le statu quo

Les participants se sont également intéressés à la question de savoir comment sortir de cette impasse. En effet, pour maintenir la qualité et l’accessibilité (financière) de nos soins de santé et le faire d’une manière réaliste pour les prestataires de soins et abordable pour l’État, nous devons impérativement donner plus de chances aux « game-changers technologiques », ces technologies qui revoient la manière dont nous pratiquons les soins de santé.

Les participants ont, entre autres, formulé les recommandations ci-dessous.

  • Le secteur des soins de santé a besoin de plus d’équipes pluridisciplinaires, qui incluent des personnes compétentes en matière de technologies médicales.
  • Nous avons besoin d’un système plus dynamique et plus simple sur le plan administratif pour évaluer et financer les technologies médicales. Les prestataires de soins et les patients sont, en effet, incapables d’utiliser bon nombre de solutions intéressantes, car ils sont coincés dans des procédures interminables et souvent peu transparentes avec l’INAMI.
  • Une culture de gestion du changement doit être mise en place dans le secteur des soins de santé. Les prestataires de soins et les administrateurs ne sont aujourd’hui pas suffisamment préparés pour faire face aux changements et innovations continus du secteur.
  • Des soins de qualité doivent être orientés vers le patient. Écouter davantage et mieux les patients et leurs aidants proches permettra de mieux adapter les programmes de soins à leurs besoins et souhaits et de poser les jalons de l’innovation technologique.
  • Des soins de qualité doivent non seulement être orientés vers le patient, mais aussi tenir compte des possibilités des prestataires de soins. Il importe dès lors d’impliquer les professionnels de soins de santé dans le développement des nouvelles technologies, de préférence dès le début du processus.
  • Le principe « mesurer, c’est savoir » résonne particulièrement dans le secteur des soins de santé. Nous devons mesurer bien davantage les résultats des traitements, par exemple par le biais de mesures « patient reported outcome measures » (PROM) et « patient reported experience measures » (PREM), mais aussi diffuser plus largement ces résultats. Nous devons également multiplier les mesures au cours du processus de soins, en recourant par exemple à la télésurveillance. L’équipe soignante pourra ainsi intervenir plus rapidement en cas de besoin et favoriser l’observance du traitement à domicile.

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Les technologies au service des soins de demain

La table ronde « les game-changers dans les soins de santé » est la deuxième d’une série d’événements organisés par beMedTech sur le thème « Technologie voor de zorg van morgen ». Une autre table ronde avait eu lieu précédemment sur l’utilisation des technologies médicales pour les personnes atteintes de maladies chroniques (plus d’infos ici). Cet automne, nous organiserons un débat sur le soutien que peuvent apporter les technologies médicales aux prestataires de soins de santé.

Le rapport complet « Gamechangers in de zorg » peut être téléchargé ici.

Outre une analyse des obstacles et une série de recommandations pour sortir de l’impasse, ce rapport comprend plusieurs exemples concrets de technologies médicales, ainsi que des citations des participants.